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REINE D’ARBIEUX

rie, et que décorait le plus curieux escalier de bois. Les rampes s’élevaient, entre-croisées, comme dans un décor. Les carreaux exhalaient un souffle frais.

Reine fuyait la salle à manger morose, en contre-bas de la rue rapide ; le salon solennel, tapissé de portraits à perruques, où les petites Dutauzin frottaient elles-mêmes les fauteuils couverts d’un satin broché. Toute enfant déjà le jardin était son refuge ; un vrai jardin de petite ville, ombreux et secret, presque appuyé à la cathédrale. Une grande ombre tournait sur cette terrasse ; en se penchant, on voyait au-dessous la promenade qui noue au pied des remparts sa belle écharpe de feuillage.

— Où est Reine ? Pourquoi Reine n’est-elle pas venue ? demandait chaque samedi, jour de marché, Mme Dutauzin de sa voix aiguë à laquelle ses deux filles faisaient écho. Et elles plaignaient « cousine Elisa » de rouler seule dans son vieux coupé, encombré de paniers et de paquets qui s’entassaient jusqu’à la vitre.

— Je voudrais voir Alban, avait dit plusieurs fois, au cours de l’automne, Mme Fondespan ; et elle s’enfermait avec son cousin pour de longs conciliabules, autour desquels la vie de la maison retenait son souffle.


L’hôtel, qui gardait le nom des comtes de la Brèche, se trouvait plus bas, dans les arbres, construit en recul derrière un portail. Toute la noblesse du voisinage, aussi ancienne que les chênes de ce