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REINE D’ARBIEUX

pour Reine, la laissant meurtrie par ce dur cha­grin, son esprit exercé à la réflexion raisonna longtemps.

Elle pensait :

— S’il ne l’aimait plus, il souffrirait moins !

En février, la maison fut prête. Germain avait pressé les ouvriers. Il avait eu la pensée de faire un voyage, de voir l’Espagne qui l’avait toujours attiré. Mais, au dernier moment, il ne partit pas. Une hâte le poussait. Homme passionné, il se dépouillait comme d’une enveloppe morte d’un passé odieux ; au fur et à mesure que renaissaient en lui des forces de vie, il retrouvait l’énergie, la résolution qui, à certaines heures, lui avaient man­qué. Il fit poser des appareils de chauffage, acheta des meubles, déménagea. « Cela l’ennuyait, disait-il, d’être en camp volant. » Mais, quand il parcourut pour la première fois les pièces installées, et dîna sous un léger lustre de porcelaine, dans une grande salle à manger qui sentait la peinture et l’encaus­tique, il connut que le vide était dans cette mai­son, et que rien de ce qu’il avait fait n’était pour lui-même. Reprendre l’existence qu’il avait menée avant son mariage, c’était impossible ! Tout était à recommencer.

Le lendemain, il donna à Génie des ordres qui la stupéfièrent, sortit en auto. À dix heures, il tra­versait Bazas par la grande rue et s’engageait sur la belle route de Grignols que trois mois avant le taxi poussif, qui ramenait Reine, avait des­cendue. Le matin était frais et brumeux. Un peu