Page:Balde - Reine d'Arbieux, 1932.pdf/186

Cette page a été validée par deux contributeurs.
186
REINE D’ARBIEUX

— Vous souffrez, et elle souffre aussi, plus que vous peut-être !

— Ah ! murmura-t-il, si j’en étais sûr !

Il y eut un silence.

— Qui me dit qu’elle est partie seule, lui jeta-t-il soudain à la face, s’insurgeant par une sorte de réflexe contre l’appel fait à sa pitié.

D’où lui venait ce désir mauvais de flétrir la femme qu’il aimait ? De la renier devant l’être pur, d’une foi obstinée, qui en gardait dans son cœur une image intacte ? Ah ! c’est que lui, il l’aimait en homme ! Il avait trop souffert depuis la veille. Il était à bout. Dans les régions troubles d’où montait — cri presque inconscient — le soupçon qu’il n’avait pas encore voulu s’avouer, est-ce que Reine n’était pas irrémédiablement souillée et perdue ?

— Ne dites pas cela, supplia Clémence.

Une question se posait, dont elle avait senti pla­ner sur eux le mystère et l’ombre, que la nature impulsive de son amie faisait plus poignante, mais qu’elle repoussait de toute son âme.

— Elle vous reviendra. Les choses ne sont pas, ne peuvent pas être ce que vous croyez, continua-t-elle, fixant dans sa pensée la figure claire, tout embrumée de son secret, dont elle connaissait si bien l’éclat fiévreux et l’odeur de larmes.

Germain s’était levé. Il savait maintenant quelle force l’avait conduit auprès de Clémence. Dans ces yeux dont la compassion avivait l’éclat, un amour