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REINE D’ARBIEUX

Lorsqu’il arriva près du portillon, une ombre se détacha du hangar, s’avança vers lui.

— Non, dit Reine, ce n’est pas lui qui m’a chassée. Mais il était fou de colère. Je n’ai pas pu supporter la pensée de le revoir, d’entendre ces horribles choses. Il me croit coupable. Je suis partie.

Il essayait de la consoler, mais elle l’écarta :

— Vous voyez, je n’ai pas voulu m’en aller sans vous dire adieu. Je me reproche tout ce qui arrive. J’ai été imprudente, faible… J’avais le goût de votre amitié. Et maintenant, c’est à cause de moi que vous allez quitter ce pays.

Elle étouffait de douleur et d’une angoisse infinie que la nuit où ils s’enfonçaient augmentait encore. Il y avait dans le petit chemin des trous d’eau et des ornières où elle trébuchait ; elle faillit glisser, se trouva presque dans ses bras, l’écarta de nouveau.

« Comment, pensait Adrien stupéfait, elle se donne tort ! »

Il laissa retomber son bras, se sentit mécontent et embarrassé. Les réactions de Reine l’étonnaient toujours. Aurait-il même imaginé qu’elle pût garder, à une pareille heure, cette âme vibrante de douceur et d’humilité ?

— Ne vous inquiétez pas de moi, dit-il brièvement. Il ne faut plus penser au mal qui est fait. Vous avez eu raison de partir. C’est un homme dur, qui ne vous a jamais comprise…