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REINE D’ARBIEUX

cauchemar. Il le menaçait, faisait le geste de le frapper. Tout à coup, il l’avait revu sur la route lorsque son auto l’avait croisé : il lui semblait que son cousin souriait d’une manière sournoise en ôtant son chapeau pour le saluer.

— C’est ta faute. Ton père pourtant t’avait prévenu.

Il s’était levé et se promenait dans le bureau tapissé d’un papier qui imitait des découpures de bois sur fond vert, où étaient accrochés des gravures de la Guyenne illustrée et un long baro­mètre fixé sur une planche d’acajou. Les volets de bois rapprochés filtraient une lumière de plein été. Comme il revenait s’asseoir dans le fauteuil tour­nant, devant la tablette du secrétaire, il revit son père à cette place. Ah ! celui-là avait su se faire obéir ! Il n’aurait pas fallu que sa femme — qui lui avait pourtant apporté en dot des milliers de pins et cinq métairies — osât mettre le nez dans ses comptes. Un homme toujours serré et bouclé, qui agissait en dessous et ne pensait qu’à son argent. Ce n’était pas lui qui se fût fourré dans tous ces ennuis.

— Mauvaise affaire, avait-il dit, le jour où son garçon lui avait parlé d’Adrien.

Le pire, c’est que Germain n’avait pas voulu écouter. Il avait l’humeur contrariante ; d’ailleurs, depuis que sa mère était morte, il le voyait peu ; le vieux, qui lui avait laissé la papeterie, s’était retiré près de Langon dans un autre moulin dont il avait fait une usine électrique.