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et la convocation de l’Assemblée générale. Ogareff écrivit lui-même le projet de la pétition que la noblesse devait présenter au tzar. La lâcheté inhérente à cette classe n’a pas encore eu le temps de se produire dans tout son éclat. C’était une période d’espérances ineptes, de rêveries folles… Nous tous, nous avons parlé et écrit en vue de la convocation de l’Assemblée générale des zemstvos et nous pouvions aller — je l’ai fait, du moins, pour ma part — jusqu’à faire des concessions, sinon dans la substance des choses, toutefois dans la forme, afin de ne pas seulement empêcher la convocation de cette assemblée que tout le pays attendait anxieusement, mais qui par le fait était impossible. J’avoue hautement ma faute et je m’en repens. Je reconnais que l’on ne doit jamais renoncer au programme socialiste révolutionnaire nettement établi, pas plus pour la forme que pour la substance. Je n’ignore pas que le nom seul de la révolution vous est haïssable ; que faire, mes amis ! puisque sans cette révolution, ni vous, ni moi, nous ne pourrons avancer d’un pas seulement. En cherchant des moyens meilleurs, au point de vue pratique, vous avez créé une théorie impossible, celle de la transformation sociale sans la réorganisation politique du pays. Aujourd’hui, cette théorie est devenue une inconséquence ; elle est aussi inadmissible que le serait le coup d’État qui n’entraînerait pas une révolution sociale. Ces deux révolutions doivent marcher de concert, car, par leur nature même elles ne font qu’un. Vous êtes prêts de tout pardonner à l’État, de le défendre au besoin, sinon directement, — ce serait par trop scandaleux, — du moins indirectement, pourvu qu’il laisse intact votre saint des saints, qui est la commune rurale de la