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prières à Dieu et à ses saints, baise la main du pope et par-dessus tout professe une adoration pour le tzar.

La princesse n’est pas en bonne entente avec lui. Mais, en s’appuyant sur l’autorité du souverain et de toute la société moscovite, le prince voyage ici pour prendre sa femme et ses enfants et les emmener avec lui dans cet abîme ordurier qui est Moscou. Elle se rend à sa rencontre dans l’intention ferme de se défendre afin de sauver ses enfants et de se soustraire elle-même à ce gouffre. La princesse aura donc à soutenir une lutte cruelle avec son mari à Genève, et je lui ai assuré qu’elle trouvera de bons conseillers en vous et une consolation en votre amitié. Bien entendu, vous vous garderez de vous présenter chez elle, car ce serait la compromettre entièrement aux yeux de son mari et même de son père, aussi bien que vis-à-vis du gouvernement russe ; c’est elle-même qui viendra vous trouver. Arrangez-vous seulement de la sorte que pendant ses visites chez vous elle ne rencontre que vos dames, si elles sont à Genève pour le moment, ou des amis dévoués et silencieux comme Tkhorjevski et Tchernetzki. Que le bon Dieu la protège alors, pour lui épargner la rencontre du prince Dolgorouki, de l’ « ancienophile » Kassatkine et de tous ces représentants de la jeune Russie. D’ailleurs, vous êtes d’assez fines mouches et vous n’avez pas besoin de leçons de prudence. Vous arrangerez donc tout pour le mieux et vous me saurez gré de vous avoir fait connaître cette femme, car vous trouverez en elle une amie fidèle et un cœur véritablement russe. Elle est désireuse de faire aussi la connaissance de Karl Vogt, pour lequel je lui donne une