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contrat, ni même le double de la liste de la cargaison, à Demontowitcz, afin qu’il put se réclamer de son titre de propriétaire.

Oui, notre Cwierczakiewicz a assumé sur sa tête une grande responsabilité. Dieu veuille qu’il puisse s’en tirer honorablement. Peut-être, a-t-il une justification à présenter ou des explications à donner à ce sujet ; peut-être cette faute retombe-t-elle sur tout autre, mais, en présence de cette dure situation et des événements graves qui vont décider du sort de la Pologne, il faut convenir que cette expédition a été menée avec une inconséquence criminelle.

Maintenant je vais vous entretenir de quelques personnes qui ont figuré dans cette déplorable expédition et aussi de moi-même. Au moment de m’embarquer, à Helsinborg, je vous écrivis une triste lettre, dans laquelle, croyant vous parler pour la dernière fois, je me répandais en plaintes trop dures contre vous-même ; cependant, j’espère ne pas vous avoir blessés car vous ne pouvez douter un seul instant de mes sentiments affectueux. Vous envisagez les choses trop sérieusement et avec trop de justesse pour ne pas comprendre que j’avais raison. Vous m’avez traité en enfant, en m’avertissant au dernier moment, par un télégramme de quelques mots, que j’avais à me rendre en tel et tel endroit, et encore, comme vous pouvez en juger par vous-mêmes, l’avez-vous fait trop tard. Cependant, on préparait cette expédition depuis plus d’un mois déjà et vous aviez tout le temps de m’en donner de plus amples renseignements en m’exposant nettement l’affaire. Et parce que vous avez négligé de le faire, de ce chef même, vous avez porté un énorme préjudice à son succès, car, si j’avais été à temps prévenu de cette