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mier, le seul réel, mais aussi le plus difficile à employer — parce qu’il implique l’abolition de l’État, c’est-à-dire l’abolition de l’exploitation politiquement organisée de la majorité par une minorité quelconque, — ce serait la satisfaction directe et complète des besoins et des aspirations du peuple, ce qui équivaudrait à la liquidation de l’existence de la classe bourgeoise, encore une fois, à l’abolition de l’État. Il est donc inutile d’en parler.

L’autre moyen, au contraire, funeste au peuple seul, précieux au salut des privilèges bourgeois, n’est autre que la religion. C’est le mirage éternel qui entraîne les masses à la recherche des trésors divins, tandis que, beaucoup plus madrée, la classe gouvernante se contente de partager entre tous ses membres, — fort inégalement d’ailleurs et en donnant toujours plus à celui qui possède davantage — les misérables biens de la terre et les dépouilles du peuple, y compris naturellement la liberté politique et sociale de celui-ci.

Il n’est pas, il ne peut exister d’État sans religion. Prenez les Etats les plus libres du monde, les Etats-Unis d’Amérique ou la Confédération Suisse, par exemple, et voyez quel rôle important y remplit, dans tous les discours officiels, la divine Providence, cette sanction supérieure de tous les Etats.

Aussi, toutes les fois qu’un chef de l’État parle de Dieu, que ce soit l’empereur d’Allemagne ou le président d’une république quelconque, soyez certain qu’il se prépare à tondre de nouveau son peuple-troupeau.

La bourgeoisie française libérale et voltairienne, poussée par son tempérament à un positivisme (pour ne pas dire à un matérialisme) singulièrement étroit et brutal, étant devenue classe gouvernante par son triomphe de