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populaires semble vouloir établir, sur les ruines des anciennes autorités et des gouvernements existants, un système d’autorité et un gouvernement nouveaux. Mais ce serait là une profonde erreur. Le gouvernement de l’Internationale, si gouvernement il y a, ou plutôt son action organisée sur les masses, se distinguera toujours de tous les gouvernements et de l’action de tous les États par cette propriété essentielle, de n’être jamais que l’organisation de l’action — non officielle et non revêtue d’une autorité ou d’une force politique quelconque, mais tout à fait naturelle — d’un groupe plus ou moins nombreux d’individus inspirés par la même pensée et tendant vers le même but, d’abord sur l’opinion des masses, et seulement ensuite, par l’intermédiaire de cette opinion plus ou moins modifiée par la propagande de l’Internationale, sur leur volonté, sur leurs actes. Tandis que les gouvernements, armés d’une autorité, d’un pouvoir et d’une force matérielle, que les uns disent tenir de Dieu, les autres de leur intelligence supérieure, d’autres enfin de la volonté populaire elle-même, exprimée et constatée au moyen de ce tour de passe-passe qu’on appelle le suffrage universel, s’imposent violemment aux masses, les forcent à leur obéir, à exécuter leurs décrets, sans se donner même la plupart du temps |130 l’apparence de consulter leurs sentiments, leurs besoins et leur volonté[1]. Il y a entre la puissance

  1. Le passage qui finit ici, et qui commence vingt-cinq lignes plus haut, après les mots « une profonde erreur », a été omis dans l’Almanach du Peuple. Il y a été remplacé par celui-ci, qui en est un résumé : « Mais ce serait là une profonde erreur. L’action organisée de l’Internationale sur les masses se distinguera toujours de tous les gouvernements et de l’action de tous les États, par cette propriété essentielle de n’être que l’action naturelle, non officielle, d’une simple opinion, en dehors de toute autorité. »