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compare à celles de la France. Depuis une dizaine d’années à peine, et grâce à quelques professeurs venus de Suisse et d’Allemagne, comme les Moleschott, les Schiff et d’autres, tant injuriés par Mazzini, quelques lueurs de la science positive moderne ont un peu rayonné sur des auditoires destinés jusqu’alors à la respectable pénombre des études rétrospectives, mystiques, classiques, métaphysiques, juridiques, dantesques et romaines, et ont apporté un souffle d’air frais à ces jeunes poitrines qui étouffaient dans cette atmosphère étroitement et stupidement historique. Une autre cause d’ignorance, c’étaient les conspirations permanentes et les continuels soulèvements de cette jeunesse, plus encore pour l’unité politique que pour la liberté de la patrie, toujours pour l’État et jamais pour le peuple.

S’étant habituée à ne pas chercher sa pensée ailleurs que dans la pensée de Mazzini, et à ne chercher sa volonté que dans l’initiative héroïque de Garibaldi, elle est devenue une jeunesse pleine de cœur et d’héroïsme, mais privée tout à fait de volonté propre et presque sans cervelle.

Le pis est qu’elle s’est accoutumée à ne considérer les multitudes populaires qu’avec mépris, et sans s’occuper d’elles le moins du monde. Le patriotisme abstrait dont elle s’est nourrie pendant tant d’années à l’école de ses deux grands chefs, Mazzini et Garibaldi, et qui tend uniquement et quasi-exclusivement à l’établissement de l’indépen-