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des eaux de Naples, — et la Consorteria n’accorde son crédit et sa haute protection qu’à qui vote pour elle. L’autre lien qui l’unit étroitement à l’État est celui-ci : les fils de cette classe occupent tous les emplois bureaucratiques, judiciaires, policiers, militaires de l’État ; leur avancement dépend de la bonne conduite de leurs parents, c’est-à-dire de leur soumission politique. Or, quel père serait assez dénaturé pour voter contre la « carrière » de son propre fils ?

L’État italien est ruineux et ruiné. Il ne se soutient à grand peine qu’en écrasant le pays d’impôts, et tout ce qui reste encore de richesse à celui-ci sert de pâture à la Consorteria, en sorte qu’il n’y a plus pour la bourgeoisie moyenne que des miettes : et la vie se fait de jour en jour plus chère, et le luxe plus raffiné, et avec le luxe se raffine aussi la vanité bourgeoise. Cette vanité, jointe à l’étroitesse de ses ressources, la fait vivre dans des embarras continuels, qui l’abattent, la démoralisent, lui troublent le cœur et lui enlèvent le peu de dignité et d’esprit qui lui restent.

Et je le répète : cette classe, qui fut un temps si puissante, si intelligente et si prospère, et qui aujourd’hui s’achemine lentement, mais fatalement, vers sa ruine, est déjà morte intellectuellement et moralement. Elle n’a plus ni foi, ni pensée, ni aspirations d’aucune espèce. Elle ne veut ni ne peut revenir en arrière, mais elle n’ose néanmoins pas regarder en avant ; de sorte qu’elle végète au jour