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les livres possibles, mais il n’en a compris réellement aucun. Il est réellement incapable de concevoir une idée. Sa mémoire, à force de travail opiniâtre, a retenu une masse de faits ; mais ces faits ne lui disent absolument rien, ils l’écrasent, et ne font que manifester davantage sa sottise : car il les cite à tort et à travers, et en tire pour la plupart du temps des conséquences saugrenues. Mais s’il n’a point la réelle conception des idées, il en a toute la phrase. Il vit, il respire, il se noie dans la phrase. Et le dernier but, le dernier mot de cette phrase, c’est lui. Il est en éternelle adoration devant lui-même. Toutes ses idées et toutes ses convictions, qu’il change à volonté selon les besoins du moment, ne sont qu’un piédestal pour rehausser sa petite personne.

On se demande comment un si insignifiant personnage a pu s’élever au rôle de dictateur qu’il joue maintenant dans l’Internationale de Genève ? Cette question se résout simplement. D’abord et avant tout, au milieu de la misère générale, il est le possesseur heureux de douze à quinze mille livres de rente ; ajoutez à cela une ambition aussi vaniteuse que passionnée ; un front d’airain, une conscience sans scrupule, l’indifférence la plus absolue pour tous les principes, et un esprit d’intrigue des plus |101 remarquables. C’est une vraie nature de démagogue, moins le courage et l’esprit.

Grâce à la puissance de son père, il a pu sauter par-dessus les examens du gymnase, et s’est trouvé dans les années 1860-1863 étudiant de l’université