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lucratif en Russie, — Outine, est-il besoin de le dire, est Juif de naissance, et, qui pis est, Juif russe. Il en a la figure, le tempérament, le caractère, les manières, toute la nature nerveuse à la fois insolente et lâche, vaniteuse et mercantile. Outre les douze mille francs par an[1] que lui donne aujourd’hui son père, il a encore hérité de lui et de son vilain commerce — auquel dans son enfance, jusqu’à l’âge de l’adolescence, il avait pris une part active — le génie et la tradition des sales tripotages, de l’astuce, de l’intrigue. Il a un front d’airain ; pour lui, mentir ne coûte rien. Il est foncièrement faux, et, quand il croit avoir besoin de quelqu’un soit pour sa vanité, soit pour sa cupidité, il se fait aimable, cajoleur, flatteur ; les gens qui ne s’y connaissent pas diraient le meilleur enfant du monde. On ne peut pas dire qu’il soit bête ; il a, au contraire, avec la passion du mensonge, l’esprit de la ruse, toute la fourberie des exploiteurs des faiblesses et de la sottise du monde. Mais lui aussi est un sot infatué de lui-même. Voilà sa faiblesse principale, son talon d’Achille, l’écueil contre lequel il se brisera toujours. Il crève d’une vanité qui déborde |100 et qui finit toujours par trahir sa véritable nature à tout le monde. Sa capacité intellectuelle est fort petite. J’ai rencontré peu d’hommes dont l’esprit soit frappé de stérilité, d’impuissance, comme le sien. Travailleur très assidu, il lit tous

  1. Bakounine a dit plus haut « quinze mille » ; plus loin il dira « douze à quinze mille ».