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naissance, y compris sans doute eux-mêmes, tout ce qui leur parut en constituer la force, le mouvement, la vie, l’intelligence, et ils appelèrent cela du nom générique d’esprit ; puis ils donnèrent au reste, au résidu informe et inerte qu’ils supposèrent devoir rester après cette opération abstractive, exécutée inconsciemment sur le monde réel par leur propre esprit, le nom de matière. Après quoi ils s’étonnèrent que cette matière qui, de même que cet esprit, n’exista jamais que dans leur imagination, leur apparût si inerte, si stupide, en présence de leur Dieu esprit pur.

Quant à nous, nous l’avouons franchement, nous ne connaissons pas votre Dieu, mais nous ne connaissons pas non plus votre matière ; ou plutôt nous savons que l’un et l’autre sont également des Non-Êtres créés à priori par la fantaisie spéculative des naïfs penseurs des siècles passés. Par ces mots matériel et matière, nous entendons, nous, la totalité, toute l’échelle des êtres réels, connus et inconnus, depuis les corps organiques les plus simples jusqu’à la constitution et au fonctionnement du cerveau du plus grand génie : les plus beaux sentiments, les plus grandes pensées, les faits héroïques, les actes de dévouement, les devoirs comme les droits, le sacrifice comme l’égoïsme, tout, jusqu’aux aberrations transcendantes et mystiques de Mazzini, de même que les manifestations de la vie organique, les propriétés et actions chimiques, l’électricité, la lumière, la chaleur, l’attraction naturelle des corps,