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socialistes bourgeois de Vienne, de Munich et de Stuttgart, et qu’ils ne reconnaissaient d’autre patrie que le camp international des travailleurs de tous les pays luttant contre le capital bourgeois ; que pour eux il n’y a ni Allemands, ni Slaves, ni Magyars, ni Italiens, ni Français, ni Anglais, mais des hommes seulement, — leurs amis, s’ils sont des travailleurs, leurs ennemis s’ils sont des bourgeois exploiteurs et dominateurs.

On ne pouvait poser plus nettement le programme du prolétariat de tous les pays.

Que s’ensuit-il ? Que les ouvriers autrichiens, par tous les efforts qu’ils font pour s’émanciper eux-mêmes, servent, non une cause nationale, mais la cause universelle des travailleurs du monde entier. Ne sont-ils pas, sous ce rapport, bien au-dessus des populations ouvrières de tous les autres pays, sans en excepter même les ouvriers de la France, qui, à côté de leurs héroïques vertus, ont le grand tort de ne pouvoir jamais oublier qu’ils ont l’honneur d’être Français et que Paris est la capitale de la France, que dis-je, du monde ?

Les ouvriers viennois ne tiennent pas à Vienne plus qu’à une autre ville. Ils ne se croient pas le centre du monde. Comme ils n’ont aucune tradition héroïque et révolutionnaire dans leur passé, ils ne peuvent heureusement tirer vanité de rien : mais ils sont libres aussi de toutes ces réminiscences de 89 et de 93, fardeau magnifique mais pesant et qui paralyse trop souvent la puissance créatrice du socia-