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L’Association internationale des travailleurs, faisant donc complètement abstraction de toutes les intrigues politiques du jour, ne connaît à cette heure qu’une seule politique, celle de sa propagande, de son extension et de son organisation. Le jour où la grande majorité des travailleurs de l’Amérique et de l’Europe sera entrée et se sera bien organisée dans son sein, il n’y aura plus besoin de révolution : sans violence, la justice se fera. El s’il y a alors des têtes cassées, c’est que les bourgeois l’auront bien voulu.

Encore quelques années de développement pacifique, et l’Association internationale deviendra une puissance contre laquelle il sera ridicule de vouloir lutter. Voilà ce que les bourgeois ne comprennent que trop bien, et voilà pourquoi ils nous provoquent aujourd’hui à la lutte. Aujourd’hui, ils espèrent encore pouvoir nous écraser, mais ils savent que demain ce sera trop tard. Ils veulent donc nous forcer à leur livrer bataille aujourd’hui.

Tomberons-nous dans ce piège grossier, ouvriers ? Non. Nous ferions trop de plaisir aux bourgeois, et nous ruinerions notre cause pour longtemps. Nous avons pour nous la justice, le droit, mais notre force n’est pas encore suffisante pour lutter. Comprimons donc notre indignation dans nos cœurs, restons fermes, inébranlables, mais calmes, quelles que soient les provocations des blancs-becs impertinents de la bourgeoisie. Souffrons encore, ne sommes-nous pas habitués à souffrir ? Souffrons, mais n’oublions rien.