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privilégiées, n’entendons-nous jamais cette pauvre petite bourgeoisie, qui, si elle avait un peu plus d’esprit et de cœur, ne tarderait pas à venir se joindre à nous pour combattre la grande et moyenne bourgeoisie qui ne l’écrase pas moins aujourd’hui qu’elle écrase le prolétariat. Et si le développement économique de la société allait continuer dans cette direction encore une dizaine d’années, ce qui nous paraît d’ailleurs impossible, nous verrions encore la plus grande partie de la bourgeoisie moyenne tomber dans la situation actuelle de la petite bourgeoisie d’abord, pour aller se perdre un peu plus tard dans le prolétariat, toujours par suite de cette concentration fatale de la propriété en un nombre de mains de plus en plus restreint, ce qui aurait pour résultat infaillible de partager le monde social définitivement en une petite minorité excessivement opulente, savante, dominante, et une immense majorité de prolétaires misérables, ignorants et esclaves.

Il est un fait qui doit frapper tous les esprits consciencieux, tous ceux qui ont à cœur la dignité humaine, la justice, c’est-à-dire la liberté de chacun dans l’égalité et par l’égalité de tous. C’est que toutes les inventions de l’intelligence, toutes les grandes applications de la science à l’industrie, au commerce et généralement à la vie sociale, n’ont profité jusqu’à présent qu’aux classes privilégiées, aussi bien qu’à la puissance des États, ces protecteurs éternels de toutes les iniquités politiques et sociales, jamais aux masses populaires. Nous n’avons