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en fils, a toujours poursuivi un seul but : celui de la création d’une grande puissance allemande, fondée en partie sur la destruction et en partie sur l’asservissement des populations slaves qui étaient les habitants primitifs de tout le royaume de Prusse actuel, et dont une partie encore ont conservé leurs traits, leurs mœurs et jusqu’à leur langue slaves, malgré tous les efforts qu’on a faits pour les germaniser. D’abord vassaux de la couronne de Pologne, les ducs de Prusse[1] finirent par déposséder leur ancien suzerain. D’abord ils se rendirent indépendants de lui, puis ils commencèrent à détacher une à une ses provinces, enfin ils se proclamèrent rois, et, par la main de leur puissant successeur Frédéric le Grand, de concert avec la Russie et l’Autriche, ils donnèrent enfin le coup de grâce à cette malheureuse Pologne, jadis leur souveraine.

À moins de faire preuve d’une profonde ignorance, personne ne pourra contester que toute la puissance politique de la Prusse a été fondée exclusivement au détriment et sur la ruine complète de la Pologne. Cette puissance date réellement du partage de ce royaume-république, et de la conquête de la Silésie,

  1. On sait qu’Albert de Brandebourg, grand-maître de l’Ordre Teutonique, se transforma en 1525 en duc de Prusse : son duché, pour lequel il se reconnut vassal du roi de Pologne, était constitué par les terres de l’Ordre, qu’Albert avait sécularisé. Le duché de Prusse passa en 1618 dans la maison des électeurs de Brandebourg. Le traité de Wehlau (1657) dégagea la Prusse des liens de la suzeraineté polonaise. L’électeur de Brandebourg Frédéric III prit le titre de roi de Prusse en 1701. — J. G.