réconcilier, s’embrasser, et dévorer et étouffer et écraser ensemble la malheureuse et trop belle Italie, la condamner à trois siècles de mort. Eh bien, je trouve encore tout cela fort naturel, logique, inévitable, mais néanmoins abominable, et je maudis à la fois et le Pape et l’Empereur.
Passons à la France. Après une lutte qui a duré un siècle, le catholicisme, soutenu par l’État, y a finalement triomphé du protestantisme. Eh bien, ne se trouve-t-il pas encore aujourd’hui en France des politiciens ou des historiens de l’école fataliste et qui, se disant révolutionnaires[1], considèrent cette victoire du catholicisme — victoire sanglante et inhumaine s’il en fut — comme un véritable triomphe pour la Révolution ? Le catholicisme, prétendent-ils, était alors l’État, la démocratie, tandis que le protestantisme représentait la révolte de l’aristocratie contre l’État et par conséquent contre la démocratie. C’est avec de pareils sophismes, tout à fait identiques d’ailleurs aux sophismes marxiens, qui, eux aussi, considèrent les triomphes de l’État comme ceux de la démocratie sociale, — c’est avec ces absurdités aussi dégoûtantes que révoltantes qu’on pervertit l’esprit et le sens moral des masses, en les habituant à considérer leurs exploiteurs sanguinaires, leurs ennemis séculaires, leurs tyrans, les maîtres et les serviteurs de l’État, comme des organes, des représentants, des héros, des serviteurs
- ↑ Bakounine fait allusion aux républicains catholiques de l’école de Buchez. — J. G.