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en réalité rien aujourd’hui qu’une institution de l’État, une sorte de police noire sur les âmes au profit de l’État, parce qu’en dehors de l’État ils ne peuvent plus avoir ni revenus ni puissance. La bourgeoisie enfin, je l’ai déjà dit et je le répète encore, la bourgeoisie est définitivement tombée à l’état de chapon. Elle fut virile, audacieuse, héroïque, révolutionnaire, il y a quatre-vingts ans ; elle le redevint encore une fois, il y a cinquante-cinq ans, et elle resta telle, quoique déjà à un degré beaucoup moindre, pendant la Restauration, depuis 1815 jusqu’en 1830. Repue et satisfaite par la révolution de Juillet, elle eut encore des rêves révolutionnaires jusqu’en Juin 1848. À cette époque elle se réveilla définitivement réactionnaire. Elle est aujourd’hui le profitant et par conséquent le partisan le plus intéressé et le plus passionné de l’État.

Restent donc les paysans et les ouvriers des villes. Mais les paysans, dans presque tous les pays de l’Occident de l’Europe, — moins l’Angleterre et l’Écosse, où proprement les paysans n’existent pas, moins l’Irlande, l’Italie et l’Espagne où ils se trouvent dans une situation misérable, et par conséquent révolutionnaire et socialiste sans qu’ils le sachent eux-mêmes, — en France et en Allemagne surtout, sont à demi satisfaits ; ils jouissent ou croient jouir d’avantages qu’ils s’imaginent avoir intérêt à conserver contre les attaques d’une révolution sociale ; ils ont sinon les profits réels, au moins le rêve vaniteux, l’imagination de la propriété. Ils sont