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de 1793, capables de sacrifier et leur unité et leur autorité bien-aimées aux nécessités de la Révolution, plutôt que de ployer leur conscience devant l’insolence de la réaction. Ces Jacobins magnanimes, à la tête desquels se place naturellement Delescluze, une grande âme et un grand caractère, veulent le triomphe de la Révolution avant tout ; et comme il n’y a point de révolution sans masses populaires, et comme ces masses ont éminemment aujourd’hui l’instinct socialiste et ne peuvent plus faire d’autre révolution qu’une révolution économique et sociale, les Jacobins de bonne foi, se laissant entraîner toujours davantage par la logique du mouvement révolutionnaire, finiront par devenir des socialistes malgré eux.

Telle fut précisément la situation des Jacobins qui firent partie de la Commune de Paris. Delescluze et bien d’autres avec lui signèrent des programmes et des proclamations dont l’esprit général et les promesses étaient positivement socialistes. Mais comme, malgré toute leur bonne foi et toute leur bonne volonté, ils n’étaient que des socialistes bien plus extérieurement entraînés qu’intérieurement convaincus, comme ils n’avaient pas eu le temps, ni même la capacité, de vaincre et de supprimer en eux-mêmes une masse de préjugés bourgeois qui étaient en contradiction avec leur socialisme récent, on comprend que, paralysés par cette lutte intérieure, ils ne purent jamais sortir des généralités, ni prendre une de ces mesures décisives qui