Page:Bakounine - Œuvres t4.djvu/14

Cette page a été validée par deux contributeurs.

défiance contre eux-mêmes que contre toutes les autres personnes. Contrairement à cette pensée des communistes autoritaires, qu’une Révolution sociale peut être décrétée et organisée soit par une dictature, soit par une assemblée constituante issue d’une révolution politique, nos amis les socialistes de Paris ont pensé qu’elle ne pouvait être faite et amenée à son plein développement que par l’action spontanée et continue des masses, des groupes et des associations populaires. »

La Commune, affirmation de l’idée fédéraliste, n’avait rien de commun avec l’État socialiste ou Volksstaat que la Sozial-Demokratie marxiste inscrivait sur son programme. Par quelle étrange contradiction Marx se déclara-t-il, lui aussi, le partisan de la Commune de Paris ? C’est, explique Bakounine dans sa Lettre à la Liberté, qu’il ne pouvait pas faire autrement :

« Par cette insurrection, dont le trait principal est la révolte de la Commune et des associations ouvrières contre l’État, la France est remontée d’un seul coup à son rang, et la capitale de la révolution mondiale, Paris, a repris sa glorieuse initiative à la barbe et sous le canon des Allemands bismarckianisés. L’effet en fut si formidable partout, que les marxiens eux-mêmes, dont toutes les idées avaient été renversées par cette insurrection, se virent obligés de tirer devant elle leur chapeau. Ils firent plus : à l’envers de la plus simple logique et de leurs sentiments véritables, ils proclamèrent que son programme et son but étaient les leurs. Ce fut un travestissement vraiment bouffon, mais forcé. Ils avaient dû le faire, sous peine de se voir débordés, et abandonnés de tous, tellement la passion que cette révolution avait provoquée en tout le monde avait été puissante. »

L’important fragment de 75 feuillets qui termine le volume me paraît une des choses les plus intéressantes qui soient sorties de la plume de Bakounine. Dans les premières pages, il montre, avec une grande vigueur de