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Qu’est-ce que l’autorité ? Est-ce la puissance inévitable des lois naturelles qui se manifestent dans l’enchaînement et dans la succession fatale des phénomènes tant du monde physique que du monde social ? En effet, contre ces lois, la révolte est non seulement défendue, mais elle est encore impossible. Nous pouvons les méconnaître ou ne point encore les connaître, mais nous ne pouvons pas leur désobéir, parce qu’elles constituent la base et les conditions mêmes de notre existence ; elles nous enveloppent, nous |174 pénètrent, règlent tous nos mouvements, nos pensées et nos actes ; de sorte qu’alors même que nous croyons leur désobéir, nous ne faisons autre chose que manifester leur toute-puissance.

Oui, nous sommes absolument les esclaves de ces lois. Mais il n’y a rien d’humiliant dans cet esclavage, ou plutôt ce n’est pas même l’esclavage. Car l’esclavage suppose un maître extérieur, un législateur qui se trouve en dehors de celui auquel il commande ; tandis que ces lois ne sont pas en dehors de nous : elles nous sont inhérentes, elles constituent notre être, tout notre être, tant corporel qu’intellectuel et moral ; nous ne vivons, nous ne respirons, nous n’agissons, nous ne pensons, nous ne voulons que par elles. En dehors d’elles, nous ne sommes rien, nous ne sommes pas. D’où nous viendrait donc le pouvoir et le vouloir de nous révolter contre elles ?

Vis-à-vis des lois naturelles, il n’est pour l’homme