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réelles, qu’elles ne sont rien que ces choses. Les choses n’obéissent point à des lois générales, comme se plaisent à dire les positivistes, dont le gouvernementalisme doctrinaire cherche un appui naturel dans cette fausse expression. Les choses, considérées dans leur ensemble, n’obéissent pas à ces lois, parce qu’en dehors d’elles il n’y a personne, ni rien qui puisse les leur dicter et les leur imposer. En dehors d’elles, ces lois n’existent pas même comme abstraction, comme idée, car toutes les idées n’étant rien que la constatation et l’explication d’un fait existant, il faut, pour qu’il y ait l’idée d’une loi quelconque, que le fait[1] ait existé d’abord. D’ailleurs nous savons que toutes les idées, y compris celles des lois naturelles, ne se produisent et n’existent comme idées, sur cette terre, que dans le cerveau humain.

Donc, si les lois, comme les causes, comme les forces naturelles, n’ont aucune existence en dehors des choses, elles doivent, pour peu qu’elles existent, — et nous savons par expérience qu’elles existent, — elles doivent, dis-je, exister dans l’ensemble des choses, en constituer la propre nature ; non dans chaque chose isolément prise, mais dans leur ensemble universel, embrassant toutes les choses passées, présentes et à venir. Mais nous avons vu que cet ensemble, que nous appelons l’Univers ou la Causalité universelle, n’est autre chose que la

  1. Dans le manuscrit il y a, par un lapsus, « la loi » au lieu de « le fait ». — J. G.