Page:Bakounine - Œuvres t3.djvu/197

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Non, les classes ne se sont jamais sacrifiées et ne le feront jamais, parce que c’est contraire à leur nature, à leur raison d’être, et rien ne se fait et ne peut se faire contre la nature et contre la raison. Bien fou donc serait celui qui attendrait d’une assemblée privilégiée quelconque des mesures et des lois populaires ! )

De tout ce qui vient d’être dit, il résulte qu’il est parfaitement légitime, sage, nécessaire, de restreindre, dans la pratique, le droit d’élection. Mais le meilleur moyen de le restreindre, c’est d’établir un cens électoral, une sorte d’échelle mobile[1] politique, dont voici la double utilité : d’abord, il sauvegarde le corps électoral contre la pression brutale des masses ignorantes ; et, en même temps, il ne lui permet pas de se constituer en corps aristocratique et fermé, en le tenant toujours ouvert à tous ceux qui, par leur intelligence, l’énergie de leur travail et la sagesse de leurs épargnes, ont su acquérir une propriété soit mobilière, soit immobilière, payant le chiffre voulu de contributions directes. Ce système, il est vrai, offre cet inconvénient d’exclure du corps électoral un nombre assez considérable de capacités ; et, pour parer à cet inconvénient, on avait proposé d’admettre aussi les capacités. Mais outre la difficulté qu’il y aurait à déterminer quelles sont

  1. On appelait « échelle mobile », en Angleterre, le système appliqué à la taxe sur les céréales, taxe dont le taux s’élevait ou s’abaissait selon l’abondance ou l’insuffisance de la récolte. — J. G.