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merveilleux et sa poésie immortelle ; — dans l’ordre temporel : l’institution sublime de l’État, avec le patriotisme, cette passion et cette vertu de l’État ; le droit juridique, l’esclavage, et d’immenses richesses matérielles, créées par le travail accumulé des esclaves, et dilapidées un peu, il est vrai, par la mauvaise économie des barbares, mais qui, néanmoins, réparées, complétées |259 et accrues depuis par le travail asservi et réglementé du moyen âge, ont servi de base première à la constitution des capitaux modernes.

La grande idée de l’humanité est restée complètement inconnue du monde antique. Entrevue vaguement par ses philosophes, elle était trop contraire à une civilisation fondée sur l’esclavage, et sur l’organisation exclusivement nationale des États, pour avoir pu y être admise. Ce fut le Christ qui l’annonça au monde et qui fut par là même l’émancipateur des esclaves et le destructeur théorique de l’ancienne société[1].

S’il fut jamais un homme directement inspiré par Dieu, ce fut lui. S’il est une religion absolue, c’est la sienne. En retranchant des Évangiles quelques incohérences monstrueuses qui y furent évidemment introduites soit par la sottise des copistes, soit par l’ignorance des disciples, on y trouve, sous une forme populaire, toute la vérité divine : Dieu, esprit pur, Père éternel, créateur, maître suprême, Pro-

  1. Ne pas oublier que ce n’est pas Bakounine qui parle, mais Victor Cousin. — J. G.