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inspirés, et qu’elle est encore à présent l’unique manifestation possible de la Divinité pour les masses ignorantes et par là même incapables de s’élever jusqu’à Dieu par le développement spontané de leur intelligence encore endormie.

Cette aberration de l’esprit philosophique, tout déplorables qu’en aient été les effets, fut probablement nécessaire pour compléter son éducation historique. Voilà, sans doute, pourquoi Dieu la souffrit. Averti par les tragiques expériences du siècle passé, l’esprit philosophique sait maintenant qu’en |254 déchaînant outre mesure le principe de la négation et de la critique, il marche vers l’abîme et aboutit au néant ; que ce principe, parfaitement légitime et même salutaire, lorsqu’il s’applique avec modération aux formes passagères et humaines des choses divines, devient pernicieux, nul, impuissant, ridicule, lorsqu’il s’attaque à Dieu. Il sait qu’il est des vérités éternelles qui sont au-dessus de toute investigation et de toute démonstration, et qui ne peuvent pas même faire l’objet d’un doute, parce que, d’un côté, elles nous sont révélées par la conscience universelle, par la croyance unanime des siècles, et que, d’un autre côté, elles se retrouvent comme idées innées dans l’intelligence de tout homme, et sont tellement inhérentes à notre conscience qu’il suffit que nous nous approfondissions en nous-mêmes, dans notre être intime, pour qu’elles y apparaissent devant nous dans toute leur simplicité et dans toute leur splendeur. Ces vérités fondamen-