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même la principale, sinon l’unique victime de l’iniquité et de tous les mensonges qui règnent dans la société actuelle, et parce qu’opprimé par le privilège, il réclame naturellement l’égalité pour tous.

Mais l’instinct n’est pas une arme suffisante pour sauvegarder le prolétariat contre les machinations réactionnaires des classes privilégiées. L’instinct abandonné à lui-même, et tant qu’il ne s’est pas encore transformé en conscience réfléchie, en une pensée clairement déterminée, se laisse facilement désorienter, fausser et tromper. Mais il lui est impossible de s’élever à cette conscience de lui-même, sans l’aide de l’instruction, de la science ; et la science, la connaissance des affaires et des hommes, l’expérience politique, manquent complètement au prolétariat. La conséquence est facile à tirer : Le prolétariat veut une chose ; des hommes |22 habiles, profitant de son ignorance, lui en font faire une autre, sans qu’il se doute même qu’il fait tout le contraire de ce qu’il veut ; et lorsqu’il s’en aperçoit à la fin, il est ordinairement trop tard pour réparer le mal qu’il a fait et dont naturellement, nécessairement et toujours, il est la première et principale victime.

C’est ainsi que les prêtres, les nobles, les grands propriétaires et toute cette administration bonapartiste, qui, grâce à la niaiserie criminelle du gouvernement qui s’intitule le gouvernement de la Défense nationale[1], peut tranquillement continuer aujour-

  1. Ne serait-il pas plus juste de l’appeler le gouvernement de la ruine de la France ? (Note de Bakounine.)