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Eh bien, les commissaires que Gambetta pourra envoyer dans les départements seront encore plus malheureux que les commissaires de 1848. Ennemis des ouvriers socialistes, aussi bien que de l’administration et des paysans bonapartistes, sur qui donc s’appuieront-ils ? Leurs instructions leur commanderont évidemment d’enchaîner dans les villes le mouvement révolutionnaire socialiste, et dans les campagnes le mouvement réactionnaire bonapartiste, — mais avec l’aide de qui ? D’une administration désorganisée, restée elle-même bonapartiste pour la moitié ou les trois quarts, — et de quelques centaines de pâles républicains et d’orléanistes : des républicains aussi insignifiants, aussi incertains et aussi désorientés qu’eux-mêmes, restant en dehors de la masse populaire et n’exerçant aucune influence sur personne ; et des orléanistes, bons seulement, comme tous les gens riches, à exploiter et à faire tourner un mouvement au profit de la réaction, mais incapables eux-mêmes d’une résolution et d’une action énergique. Et notez que les orléanistes seront de beaucoup les plus forts des deux, car, à côté des grands moyens financiers dont ils disposent, ils ont encore cet avantage de savoir ce qu’ils veulent, tandis que les républicains joignent, à leur extrême pénurie, le malheur de ne savoir où ils vont et de rester étrangers à tous les intérêts réels, tant privilégiés que populaires.[1] Il résultera de là que les com-

  1. La courte phrase qui suit résume un développement beaucoup plus étendu qui, dans le manuscrit de Bakounine, termine l’alinéa. Voir à l’Appendice, p. 195, l 13. — J. G.