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cette supériorité d’instruction leur droit à la domination et qui en déduisent pour les ouvriers le devoir de subordination. Ce qui fait la grandeur des ouvriers vis-à-vis des bourgeois, ce n’est pas leur instruction, qui est petite, c’est leur instinct de la justice, qui est incontestablement grand. Mais cet instinct de la justice manque-t-il aux paysans ? Regardez-les bien : sous des formes sans doute différentes, vous l’y retrouverez tout entier. Vous trouverez en eux, à côté de leur ignorance, un profond bon sens, une admirable finesse, et cette énergie de travail qui constitue l’honneur et le salut du prolétariat.

Les paysans, dites-vous, sont superstitieux et bigots, et ils se laissent diriger par les prêtres. — Leur superstition est le produit de leur ignorance, artificieusement et systématiquement entretenue par tous les gouvernements bourgeois. Et d’ailleurs ils ne sont pas du tout aussi superstitieux et bigots que vous voulez bien le dire : ce sont leurs femmes qui le sont. Mais toutes les femmes des ouvriers sont-elles bien libres vraiment des superstitions et des doctrines de la religion catholique et romaine ? Quant à l’influence et à la direction des prêtres, ils ne les subissent qu’en apparence seulement, autant que le réclame la paix intérieure, et autant qu’ils ne contredisent pas leurs intérêts. Cette superstition ne les a point empêchés, après 1789, d’acheter les terres de l’Église, confisquées par l’État, malgré la malédiction qui avait été lancée par l’Église autant contre les acheteurs que contre les vendeurs. D’où