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États victorieux, et même au profit des États vaincus, comme compensation pour d’autres territoires que ces derniers pourraient être forcés de céder. Cela s’est vu.

|44 Supposons que la grande guerre qu’on nous prophétise chaque jour éclate à la fin, entre la France, l’Italie et l’Autriche, d’un côté, et la Prusse avec la Russie, de l’autre. Si c’est la France qui triomphe, qu’est-ce qui pourra l’empêcher de s’emparer de la Suisse romande et de donner le Tessin à l’Italie ? Si c’est la Prusse qui l’emporte, qu’est-ce qui l’empêchera de mettre la main sur cette partie de la Suisse allemande qu’elle convoite depuis si longtemps, sauf à abandonner, si cela lui paraît nécessaire, à titre de compensation, une partie au moins de la Suisse romande à la France, et le Tessin à l’Italie ?

Ce ne sera pas sans doute la reconnaissance que ces grands États éprouveront pour les services de gendarme que le Conseil fédéral leur aura rendus avant la guerre. Il faut être bien naïf pour compter sur la reconnaissance d’un État. La reconnaissance est un sentiment, et les sentiments n’ont rien à faire avec la politique, qui n’a d’autre mobile que les intérêts. Nous devons bien nous pénétrer de cette idée, que les sympathies ou les antipathies que nous pouvons inspirer à nos redoutables voisins ne peuvent avoir la moindre influence sur notre sécurité nationale. Qu’ils nous aiment et qu’ils aient le cœur plein de reconnaissance pour nous, pour peu qu’ils