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qui avait cru, espéré, que pleine satisfaction aux besoins et aux légitimes aspirations des classes ouvrières allait être donnée par l’État et que celui-ci, armé de sa plénipotence, voulait et pouvait inaugurer un ordre social nouveau. Ce ne fut donc pas le socialisme qui mourut en juin, ce fut au contraire l’État qui se déclara banqueroute par devant le socialisme et qui, se proclamant incapable de lui payer la dette qu’il avait contractée envers lui, essaya de le tuer pour se délivrer de la manière la plus facile de cette dette. Il ne parvint pas à le tuer, mais il tua la foi que le socialisme avait eue en lui et il anéantit en même temps toutes les théories du socialisme autoritaire ou doctrinaire, dont les unes, comme « l’Icarie » de Cabet et comme « l’Organisation du travail » de M. Louis Blanc, avaient conseillé au peuple de s’en reposer en toutes choses sur l’État, — dont les autres avaient démontré leur néant par une série d’expériences ridicules. Même la banque de Proudhon, qui dans des conditions plus heureuses aurait pu prospérer, écrasée par l’animadversion et par l’hostilité générale des bourgeois, — succomba.

Le socialisme perdit cette première bataille par une raison toute simple : il était riche d’instincts et d’idées théoriques négatives, qui lui donnaient mille fois raison contre le privilège ; mais il manquait encore absolument d’idées positives et pratiques, qui