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raison, de la justice et de la vraie liberté, disent les autres, que ne le sont les masses populaires, ont la sainte et noble mission de les y conduire. Sacrifiant leurs intérêts et négligeant leurs propres affaires, ils doivent se dévouer au bonheur de leur frère cadet, le peuple. Le gouvernement n’est pas un plaisir, c’est un pénible devoir : on n’y cherche pas la satisfaction soit de son ambition, soit de sa vanité, soit de sa cupidité personnelle, mais seulement l’occasion de sacrifier au bonheur de tout le monde. C’est pour cela sans doute que le nombre des compétiteurs aux fonctions officielles est toujours si petit, et que rois et ministres, grands et petits fonctionnaires n’acceptent le pouvoir qu’à leur cœur défendant.

Tels sont donc, dans la société conçue selon la théorie des métaphysiciens, les deux genres différents et même opposés de rapports qui peuvent exister entre les individus. Le premier est celui de l’exploitation, et le second celui de gouvernement. S’il est vrai que gouverner signifie se sacrifier pour le bien de ceux qu’on gouverne, ce second rapport est en effet en pleine contradiction avec le premier, avec celui de l’exploitation. Mais entendons-nous. Selon la théorie idéale, soit théologique soit métaphysique, ces mots, le bien des masses, ne peuvent signifier leur bien-être terrestre, ni leur bonheur temporel ; qu’est-ce que c’est que quelques dizaines [d’années] de vie terrestre