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C’est le despotisme de l’un et l’esclavage des autres.

Que signifient donc ces mots : aimer les hommes et leur faire le bien, pour l’amour de Dieu ? C’est de les traiter comme Dieu veut qu’ils soient traités ; et comment veut-il qu’ils soient traités ? Comme des esclaves. Dieu, par sa nature, est forcé de les traiter ainsi. Étant lui-même le Maître absolu, il est forcé de les considérer comme des esclaves absolus ; les considérant comme tels, il ne peut faire autrement que de les traiter comme tels. Pour les émanciper il n’aurait qu’un seul moyen ; ce serait d’abdiquer, de s’annuler et de disparaître. Mais ce serait trop exiger de sa toute-puissance. Il peut bien, pour concilier l’amour étrange qu’il ressent pour les hommes avec son éternelle Justice, non moins singulière, sacrifier son fils unique, comme nous le raconte l’Évangile ; mais abdiquer, se suicider pour l’amour des hommes, il ne le fera jamais, au moins qu’on ne l’y force par la critique scientifique. Tant que la fantaisie crédule des hommes lui permettra d’exister, il sera toujours le souverain absolu, le Maître d’esclaves. Il est donc évident que traiter les hommes selon Dieu, ne peut signifier autre chose que de les traiter en esclaves. L’amour des hommes selon Dieu, c’est l’amour de leur esclavage. Moi, individu immortel et complet, grâce à Dieu, et qui me sens libre précisément parce que je suis l’esclave de Dieu, je n’ai besoin d’aucun