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raison humaine, l’immortalité et l’indépendance absolue des individus, avec leur mortalité et leur dépendance absolue, l’individualisme et le socialisme. Mais en examinant cette théorie et ses conséquences de plus près, il nous sera facile de reconnaître que ce n’est qu’une réconciliation apparente qui couvre sous un faux masque de rationalisme et de socialisme, l’antique triomphe de l’absurdité divine sur la raison humaine et de l’égoïsme individuel sur la solidarité sociale. En dernière instance, elle aboutit à la séparation et à l’isolement absolu des individus, et par conséquent à la négation de toute morale.

Malgré ses prétentions au rationalisme pur, elle commence par la négation de toute raison, par l’absurde, par la fiction de l’infini perdu dans le fini ou par la supposition d’une âme, d’une quantité d’âmes immortelles logées et emprisonnées dans des corps mortels. Pour corriger et pour expliquer cette absurdité, elle est forcée d’avoir recours à une autre, à l’absurdité par excellence, à Dieu, sorte d’âme immortelle, personnelle, immuable, logée et emprisonnée dans un univers passager et mortel et gardant tout de même son omniscience et son omnipotence. Lorsqu’on lui pose des questions indiscrètes, qu’elle est naturellement incapable de résoudre, parce que l’absurde ne se résout, ni ne s’explique, elle répond par ce mot terrible de Dieu, l’absolu mystérieux, qui ne