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toutes les espèces animales est toujours en proportion directe des moyens de subsistance, il est évident que le nombre des hommes devait augmenter dans une proportion plus forte que celui des animaux des autres espèces, et qu’enfin il devait arriver un moment où la nature inculte ne pouvait plus suffire à nourrir tout le monde.

Si[1] la raison humaine n’était pas progressive ; si, s’appuyant d’un côté sur la tradition qui conserve au profit des générations futures les connaissances acquises par les générations passées, et se propageant d’un autre côté, grâce à ce don de la parole qui est inséparable de celui de la pensée, elle ne se développait pas toujours davantage ; si elle n’était pas douée de la faculté illimitée d’inventer de nouveaux procédés pour défendre l’existence humaine contre toutes les forces naturelles qui lui sont contraires, cette insuffisance de la nature aurait été nécessairement la limite de la multiplication de l’espèce humaine.

Mais grâce à cette précieuse faculté qui lui permet de savoir, de réfléchir, de comprendre, l’homme peut franchir cette limite naturelle qui arrête le développement de toutes les autres espèces animales. Quand les sources naturelles furent épuisées, il en créa d’artificielles. Profitant non de sa force physique, mais de sa supériorité d’intelligence, il se mit non plus

  1. (Suite). Le Progrès, 20 (2 octobre 1869). p. 3.