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pour leur nourriture des animaux appartenant à d’autres espèces, mais nous savons fort bien qu’aussitôt que ces derniers viennent à leur manquer, ils se dévorent tranquillement entre eux. Les chattes et les truies et bien d’autres animaux encore mangent souvent leurs propres enfants, et il n’y a pas d’animal qui ne le fasse toutes les fois qu’il s’y trouve poussé par la faim. Les sociétés humaines n’ont-elles pas débuté par l’anthropophagie ? Et qui n’a pas entendu ces lamentables histoires de marins naufragés et perdus dans l’océan, sur quelque frêle embarcation, privés de nourriture, et décidant par le sort lequel d’entre eux devait être sacrifié et mangé par les autres ? Enfin, pendant cette terrible famine qui vient de décimer l’Algérie, n’avons-nous pas vu des mères dévorer leurs propres enfants ?

C’est que la faim est un rude et invincible despote, et la nécessité de se nourrir, nécessité tout individuelle, est la première loi, la condition suprême de la vie. C’est la base de toute vie humaine et sociale, comme c’est aussi celle de la vie animale et végétale. Se révolter contre elle, c’est anéantir tout le reste, c’est se condamner au néant.

Mais à côté de cette loi fondamentale de la nature vivante, il y en a une autre, tout aussi essentielle, celle de la reproduction. La première tend à la conservation des individus, la seconde à la constitution