Page:Bakounine - Œuvres t1.djvu/263

Cette page a été validée par deux contributeurs.

produits jusque-là sous la forme d’un idéalisme hypocrite ou malsain, qui les avait précisément transformés en intérêts malfaisants et iniques.

Quiconque s’est un peu occupé d’histoire n’a pu manquer de s’apercevoir qu’au fond des luttes religieuses et théologiques les plus abstraites, les plus sublimes et les plus idéales, il y a eu toujours quelque grand intérêt matériel. Toutes les guerres de races, de nations, d’États et de classes, n’ont jamais eu d’autre but que la domination, condition et garantie nécessaires de la jouissance et de la possession. L’histoire humaine, considérée à ce point de vue, n’est rien que la continuation de ce grand combat pour la vie, qui, d’après Darwin, constitue la loi fondamentale de la nature organique.

Dans le monde animal, ce combat se fait sans idées et sans phrases, il est aussi sans solution ; tant que la terre existera, le monde animal s’entre-dévorera. C’est la condition naturelle de sa vie. — Les hommes, animaux carnivores par excellence, ont commencé leur histoire par l’anthropophagie. — Ils tendent aujourd’hui à l’association universelle, à la production et à la jouissance collectives.

Mais entre ces deux termes, quelle tragédie sanglante et horrible ! Et nous n’en avons pas encore fini avec cette tragédie. Après l’anthropophagie est venu l’esclavage, après l’esclavage le servage, après le ser-