Page:Bakounine - Œuvres t1.djvu/261

Cette page a été validée par deux contributeurs.

TROISIÈME LETTRE[1]


La mauvaise conscience des bourgeois, ai-je dit, a paralysé, dès le commencement de ce siècle, tout le mouvement intellectuel et moral de la bourgeoisie. Je me corrige, et je remplace ce mot paralysé par cet autre : dénaturé. Car il serait injuste de dire qu’il y a eu paralysie ou absence de mouvement dans un esprit qui, passant de la théorie à l’application des sciences positives, a créé tous les miracles de l’industrie moderne, les bateaux à vapeur, les chemins de fer et le télégraphe, d’un côté ; et qui, de l’autre, en mettant au jour une science nouvelle, la statistique, et en poussant l’économie politique et la critique historique du développement de la richesse et de la civilisation des peuples jusqu’à leurs derniers résultats, a jeté les bases d’une philosophie nouvelle, — le socialisme, qui n’est autre chose, au point de vue des intérêts exclusifs de la bourgeoisie, qu’un sublime suicide, la négation même, du monde bourgeois.

La paralysie n’est survenue que plus tard, depuis 1848, alors qu’épouvanté des résultats de ses premiers travaux, la bourgeoisie s’est rejetée sciemment en ar-

  1. Genève, le 14 avril 1869. — Le Progrès, 8 (17 avril 1869), pp. 2-3.