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qu’ils sont devenus citoyens, ils deviennent les esclaves de l’État. Nous avons donc raison d’affirmer qu’au point de vue de l’État le bien naît non de la liberté, mais au contraire de la négation de la liberté.

N’est-ce pas une chose remarquable que cette similitude entre la théologie — cette science de l’église, et la politique — cette théorie de l’État, que cette rencontre de deux ordres de pensées et de faits en apparence si contraires, dans une même conviction : celle de la nécessité de l’immolation de l’humaine liberté pour moraliser les hommes et pour les transformer, selon l’une — en des saints, selon l’autre — en de vertueux citoyens. — Quant à nous, nous ne nous en émerveillons en aucune façon, parce que nous sommes convaincus et nous tâcherons de prouver plus bas, que la politique et la théologie sont deux sœurs provenant de la même origine et poursuivant le même but sous des noms différents ; et que chaque État est une église terrestre, comme toute église, à son tour avec son ciel, séjour des bienheureux et des Dieux immortels, n’est rien qu’un céleste État.

L’État donc, comme l’église, part de cette supposition fondamentale, que les hommes sont foncièrement mauvais et que livrés à leur liberté naturelle, ils s’entre-déchireraient et offriraient le spectacle de la plus affreuse anarchie où les plus forts assommeraient ou exploiteraient les plus faibles, — tout le con-