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quelle ils ne reconnaissent d’autres limites que des limites de fait, non de droit, ils ne suivent qu’une seule loi, — celle de leur naturel égoïsme : ils s’offensent, se maltraitent et se volent mutuellement, s’entr’égorgent et s’entre-dévorent, chacun dans la mesure de son intelligence, de sa ruse et de ses forces matérielles, comme le font aujourd’hui, ainsi que nous l’avons déjà observé, les États. — Donc la liberté humaine ne produit pas le bien, mais le mal, l’homme est mauvais de sa nature. Comment est-il devenu mauvais ? C’est à la théologie de l’expliquer. Le fait est que l’État, en naissant, le trouve déjà mauvais et se charge de le rendre bon, c’est-à-dire de transformer l’homme naturel en citoyen.

À ceci on pourra observer, que puisque l’État est le produit d’un contrat librement conclu par les hommes, et que le bien est le produit de l’État, il s’ensuit qu’il est celui de la liberté ! Cette conclusion ne sera pas juste du tout. L’État même dans cette théorie n’est pas le produit de la liberté, mais au contraire du sacrifice et de la négation volontaires de la liberté. Les hommes naturels, absolument libres de droit, mais dans le fait exposés à tous les dangers qui à chaque instant de leur vie menacent leur sécurité, pour assurer et sauvegarder cette dernière, sacrifient, renient une portion plus ou moins grande de leur liberté, et en tant qu’ils l’ont immolée à leur sécurité, en tant