librement ou bien même, comme cela arrive toujours à la longue, qui sont devenus ses sujets. Comme le droit international n’existe pas, et comme il ne saurait jamais exister d’une manière sérieuse et réelle sans miner dans ses fondements même le principe de l’absolue souveraineté des États — l’État ne peut avoir de devoirs vis-à-vis des populations étrangères. Donc s’il traite humainement un peuple conquis, s’il ne le pille et ne l’extermine qu’à demi et s’il ne le réduit pas au dernier degré d’esclavage, ce sera par politique et par prudence peut-être, ou bien par pure magnanimité, mais jamais par devoir, — car il a le droit absolu de disposer de lui à son gré.
Cette négation flagrante de l’humanité, qui constitue l’essence même de l’État, est au point de vue de l’État le suprême devoir et la plus grande vertu : elle s’appelle patriotisme, et constitue toute la morale transcendante de l’État. Nous l’appelons morale transcendante parce qu’elle dépasse ordinairement le niveau de la morale et de la justice humaines, communes ou privées, et par là-même se met le plus souvent en contradiction avec elles. Ainsi offenser, opprimer, spolier, piller, assassiner ou asservir son prochain, selon la morale ordinaire des hommes, est regardé comme un crime. Dans la vie publique au contraire, au point de vue du patriotisme, lorsque cela se fait pour la plus grande gloire de l’État, pour conserver