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nom de la religion, depuis le commencement de l’histoire, des millions de victimes humaines immolées à la plus grande gloire des Dieux, en font foi… Enfin la justice elle-même, cette mère future de l’égalité, une fois transportée par la fantaisie religieuse dans les célestes régions et transformée en justice divine, retombant aussitôt sur la terre sous la forme théologique de la grâce, et embrassant toujours et partout le parti des plus forts, ne sème plus parmi les hommes que violences, privilèges, monopoles et toutes les monstrueuses inégalités consacrés par le droit historique.

Nous ne prétendons pas nier la nécessité historique de la religion, ni affirmer qu’elle ait été un mal absolu dans l’histoire. Si c’en est un, elle fut et malheureusement elle reste encore aujourd’hui pour l’immense majorité de l’humanité ignorante, un mal inévitable, comme le sont, dans le développement de toute humaine faculté, les défaillances, les erreurs. La religion, avons-nous dit, c’est le premier réveil de l’humaine raison sous la forme de la divine déraison ; c’est la première lueur de l’humaine vérité à travers le voile divin du mensonge ; la première manifestation de la morale humaine, de la justice et du droit, à travers les iniquités historiques de la grâce divine ; c’est enfin l’apprentissage de la liberté sous le joug humiliant et pénible de la divinité, joug qu’il faudra