Page:Bakounine - Œuvres t1.djvu/139

Cette page a été validée par deux contributeurs.

dés à notre foi et à notre respect par une religion quelconque. Nous pouvons donc dire, sans crainte d’être réfutés, que de tous les animaux de cette terre, l’homme seul pense.

Seul il est doué de cette puissance d’abstraction, fortifiée et développée sans doute dans l’espèce par l’exercice des siècles, et qui, l’élevant successivement en lui-même au-dessus de tous les objets qui l’environnent, au-dessus de tout ce qu’on appelle le monde extérieur et même au-dessus de lui-même comme individu, lui permet de concevoir, de créer l’idée de la totalité des Êtres, de l’Univers, de l’Infini ou de l’Absolu, — idée tout abstraite et vide de tout contenu si l’on veut ; mais tout de même toute-puissante et cause de toutes les conquêtes postérieures de l’homme, parce que seule elle l’arrache aux prétendues béatitudes et à la stupide innocence du paradis animal, pour le jeter dans les triomphes et dans les tourments infinis d’un développement sans bornes…

Grâce à cette faculté d’abstraction, l’homme en s’élevant au-dessus de la pression immédiate que tous les objets extérieurs ne manquent jamais d’exercer sur chaque individu, peut les comparer les uns avec les autres, observer leurs rapports. — Voilà le commencement de l’analyse et de la science expérimentale. Grâce à cette même faculté, il se dédouble et se séparant de lui-même en lui-même, il s’élève au-dessus de