on ne fait pas pipi au lit, on ne vole le bien d’autrui qu’en y mettant certaines formes, on ne tue que dans des circonstances que précise l’État, etc.
Ce qui est bien est donc supposé universel sauf cas particulier, sauf culture différente, sauf conditions spéciales d’exercice du droit, sauf individu pas tout à fait ou pas encore ou presque plus humain… Alors à quoi bon parler d’une universalité si fragile ? En ces temps de mondialisation des droits de l’homme, il n’est peut-être pas superflu d’insister grossièrement sur ce bien universellement reconnu par tous, sauf par un certain nombre.
Le droit-de-l’hommisme est une idéologie comme une autre parce qu’il est non seulement une doctrine reposant sur le seul argument d’autorité, mais aussi un système de pensée qui se veut universel et donc totalitaire. Je désire aussi ardemment qu’un autre que chaque être au monde jouisse de sa liberté de penser, mais je trouve extravagant qu’on nous octroie le droit de respirer, de manger, de choisir nos opinions. Que disent les droits-de-l’hommistes de la prison ? Qu’elle doit être humaine. Humaine elle l’est. Ô combien !
Et que disent les mêmes du châtiment ? Ils se réfugient derrière l’éditorialiste de leur journal ou le philosophe du légalisme par excellence, Emmanuel Kant. Celui-là même qui écrivait à propos de ceux qui se rendent coupables de pédérastie ou de viol qu’ils devraient être castrés[1]. On n’en attend pas moins de ce sinistre doctrinaire du devoir qui considérait comme une faute de ne pas punir.
Pour lui, l’homme, grâce à sa raison, peut ne plus être esclave de ses désirs ; s’il se plie volontairement à la loi morale, il y gagne en liberté intérieure (il se trouve — pure coïncidence — que cette loi qu’élabore ma raison correspond point par point à celle des Tables de la Loi). Les hommes comptent entre eux sur cette attitude raisonnable de tous et le délinquant qui va à l’encontre de la loi universelle telle qu’elle découle de la raison pratique, celui-là est tout simplement un traître.
- ↑ Appendice à la Doctrine du droit, cité par Frédéric Gros dans Et ce sera Justice, op. cit.