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« la Loi donc la punition » ; c’est moins majestueux mais plus clair. « Le châtiment est à la loi ce que le sexe est au mariage. » (Stephen Douglas).

Est puni celui qui est jugé coupable d’avoir enfreint la Loi, laquelle varie selon les groupes. Elle est l’expression du pouvoir en place : il y a la Loi du milieu, la Loi du silence, la Loi civile du code, mais, juste ou injuste, écrite ou non, elle demeure la Loi du plus fort. Établie par l’autorité souveraine d’une société, elle ne tire sa puissance, en premier ou dernier ressort, que de la force physique des gros bras à son service : brutes payées en tant que telles par une maffia quelconque ou police d’État. En démocratie, la Loi est sanctionnée par la force publique.

Montaigne qui fut magistrat et à qui on ne la faisait pas, écrivait « Combien ay-je veu de condemnations plus crimineuses que le crime ? Les loix se maintiennent en crédit, non parce qu’elles sont justes, mais parce qu’elles sont loix. »

Il est infranchissable le précipice entre l’équité à laquelle chacun aspire et la Justice qui fait fonctionner la machine sociale au détriment des relations libres entre les êtres. Et si cinq cents courtes années nous séparent de Michel de Montaigne, il y a deux mille ans, les Romains avaient fait, semble-t-il, le tour de la question du Droit. Ils nous ont laissé par exemple le fameux adage « Summum jus, summum injuria » que l’on traduit habituellement par « excès de justice, excès d’injustice », traduction que je trouve tendancieuse ; je proposerais « Justice parfaite, parfaite injustice »[1].


En Arabie comme aux États-Unis, en France comme en Chine, l’heure est à une répression de plus en plus brutale. Sans compter que l’emprisonnement à but lucratif a de beaux jours devant lui. Les entreprises privées qui ont acheté des parts dans ce marché sont pleinement satisfaites. Même si l’économie mondiale s’effondrait, elles seraient absolument

  1. Mot à mot : « Au plus haut de la justice, le plus haut de l’injustice ».