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sont élevés dans l’aisance, les autres dans la misère.

Pourquoi n’ont-ils pas la même intelligence ? C’est en raison des atavismes ou des hérédités, quelquefois des circonstances physiologiques de la conception ; c’est, surtout, parce qu’ils n’ont pas reçu la même éducation et qu’ils ne jouissent pas de la même santé.

Qu’il nous soit permis de réfuter ici une erreur qui a servi de base à la philosophie de Darwin. D’après celui-ci, la Nature est la mesure du plus grand bien, le struggle for life, l’écrasement du faible par le fort étant sa loi générale, les inégalités de tout ordre sont fatalement irrémédiables.

Il n’est pas vrai que la Nature soit la mesure du plus grand bien ; si cela était, nous n’aurions qu’à la suivre, nous vivrions à l’état sauvage comme les autres animaux. C’est au contraire parce que nous la trouvons insuffisante, imparfaite que nous nous réunissons en société. Elle n’est donc pas pour nous une règle immuable. Le rôle de la Société consiste précisément à la rectifier, en atténuant les inégalités fâcheuses qui sont cause de la débilité des uns et de l’imbécillité des autres.

L’Égalité n’est pas dans la Nature, elle est dans le progrès de la Science, dans l’organisation et le fonctionnement du meilleur état social. Il ne faudrait point s’imaginer que, par le fait de l’institution du régime collectiviste, ceux qui sont aujourd’hui au niveau de la brute vont devenir subitement des hommes intelligents. Victimes d’une ascendance dégradée, ils resteront ce qu’ils sont et leur postérité immédiate ne leur sera guère supérieure. Le progrès se manifeste plus lentement.