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égaliser les chances de la vie que les uns et les autres ont formé une société. Le fort s’est dit « À quoi me sert ma force, puisque deux faibles peuvent me tuer ? » Et il a dit à ceux-ci : « Unissons-nous, travaillons ensemble et partageons le fruit de notre travail. » C’est donc un pacte d’égalité qui a été conclu ; s’il n’est pas observé, autant valait demeurer à l’état d’anarchie.

Les rouages de la société primitive étaient assez simples ; ceux de la nôtre sont plus compliqués. L’extrême division du travail et l’intervention de la machine ont transformé la vie sociale. C’est ici qu’apparaît la science économique qu’on s’est plu à embrouiller à dessein, mais qui, en réalité, est plus simple qu’on ne se l’imagine. Elle repose tout entière sur ce principe :

Pour produire ce qui est nécessaire à l’entretien d’un individu, il faut la collaboration directe ou indirecte de tous les membres de l’association.

L’instituteur, le laboureur, le soldat ont contribué à la construction de cette maison : celui-ci en maintenant l’ordre public, celui-là en fournissant du pain aux maçons qui l’ont faite, l’autre en les instruisant. On peut en dire autant de tous les travailleurs. Dès lors il ne doit pas y avoir d’inégalité dans les salaires, parce que tous les concours sont également utiles, parce qu’il est aussi indispensable d’avoir du pain et d’être instruit que d’avoir des vêtements et un logis. Si l’on paye le cordonnier moins qu’un autre ouvrier, c’est qu’on peut se passer de chaussures ; or, cela n’est pas vrai : demandez-le plutôt à Messieurs les Bourgeois.

Pourquoi donc des rétributions inégales ? Est-ce que les mieux rétribués dépensent plus de force