Page:Baju - L’Anarchie littéraire, 1892.djvu/33

Cette page a été validée par deux contributeurs.

À la première se rattachent les Symbolistes, les Romans, les Anarchistes, les Magiques, les Magnifiques ; à la seconde appartiennent les Décadents et les Socialistes. Ceux-ci sont les seuls qui aient apporté des théories nouvelles en esthétique, en morale comme en philosophie, les seuls qui s’appuient sur une base invariable et éternelle : la Science. Les autres, malgré l’apparente divergence de leurs idées, ont un principe commun : le Dogme ; ils ne représentent que le passé, sous quelque forme que ce soit.

Quelle est donc celle de ces écoles qui est appelée à prédominer, ou plutôt en quelle direction la littérature va-t-elle évoluer ? Plusieurs critiques se sont posé la question et chacun l’a résolue dans le sens de ses préférences personnelles. Pour moi, cela ne fait pas l’ombre d’un doute ; comme je l’ai déjà dit : « la littérature de demain ne sera ni naturaliste, ni psychologique, ni symboliste, ni romane : elle sera sociale. Le Symbolisme est un anachronisme, quelque chose comme le boudhisme que des esprits malins et aigris contre le siècle jettent à leurs contemporains en manière de raillerie et de dérision. Le Progrès n’a pas à tenir compte de cette régression de la pensée, qui n’est pas même à la marche ascensionnelle de la civilisation ce que le moindre escarpement est à la pente des montagnes. Les Cornes du Faune, d’Ernest Raynaud, le Pélerin passionné de Moréas, ne sont pas de ces œuvres qui font dévier l’humanité et lui impriment une direction nouvelle. Malgré le concert de réclames que Symbolistes et Romanistes ont su organiser autour d’eux, ils ne sont rien, ils n’exerceront aucune influence sur leur époque. L’avenir est à la science, à l’expérimentation, au chiffre. L’Art social est donc la dernière